Lëtzebuerg-Luxemburg-Luxembourg

Les fonctions du français au Grand-Duché de Luxembourg

Version électronique d'un article publié dans le Lëtzebuerger Land 3, 20 I 2006, pp. 12-16

 

    1. Introduction: Le cadre législatif | 2. Histoire linguistique: 2.1. Le quartier wallon; 2.2. La politique linguistique de l'occupant nazi | 3. Les fonctions du français dans la société luxembourgeoise moderne: 3.1. Le français, langue de l'Etat: 3.1.1. Le français dans les Administrations publiques; 3.1.2 Le français à l'école; 3.2. Le français, langue d'expression culturelle; 3. 3 Le français, lingua franca

     

2. HISTOIRE LINGUISTIQUE: 2.1. Le quartier wallon

    Jusqu’en 1839, le français, ou des dialectales romans, les parlers wallons et lorrains, ont été la langue maternelle des habitants du quartier wallon du Duché puis Grand-Duché de Luxembourg.

    Jusqu’au dernier démembrement de 1839, les habitants du Luxembourg avaient donc deux langues maternelles selon leur lieu de résidence, à savoir:

            1. le luxembourgeois ou l’allemand luxembourgeois , comme on l’appelait à l’époque, dans le quartier allemand
            2. et le français et ses parlers, le wallon et le lorrain, dans le quartier wallon.

    Les traces de l'ancienne romanité du Grand-Duché sont nombreuses :

            1. Aux Archives de l’Etat, à côté du premier texte en luxembourgeois, on trouvera des textes wallons et lorrains collectés vers 1806 dans le cadre d’une enquête linguistique menée dans le Département des Forêts par l’administration impériale sous l’impulsion de Coquebert de Montbret.
              Bib.: Reisdoerfer, Joseph. "Les dialectologues de Napoléon: notes sur la première enquête linguistique dans l'ancien duché de Luxembourg." Bulletin linguistique et ethnologique / Institut grand-ducal. Section de linguistique, de folklore et de toponymie 28 (1998): 5-15. BnLux
            2. On a continué à parler des patois romans sur le territoire même de l’actuel Grand-Duché de Luxembourg jusqu’au début du XXe siècle :
              1. Le wallon dans le nord du pays à Doncols/Sonlez

                Bib.:
                Atten, Alain. Le wallon frontalier de Doncols-Sonlez / Grenzwallonisch aus Doncols-Soller. Vol. XV, Beiträge zur luxemburgischen Sprach- und Volkskunde. Luxembourg: Institut grand-ducal section de linguistique, de folklore et de toponymie, 1980; Reisdoerfer, Joseph. "Les patois romans du Grand-Duché de Luxembourg: État des recherches et perspectives." De Familjefuerscher 5, no. 15 V 1988 (1988): 41-44. BnLux
              2. Le lorrain dans le sud, à Rodange:

                Le patois lorrain de Rodange est documenté par deux sources:



                Il semble que cette bourgade ait été soumise à l'influence culturelle germanique de l'époque carolingienne — VIIIe siècle ap. J.-C. — jusqu'au haut moyen âge — XIIIe ap. J.-C. — ;
                ensuite se manifesta une forte influence romane qui fit triompher le patois roman sur le dialecte germanique.
                Ce patois roman s'est maintenu jusqu'à la fin du XIXe où il a été éliminé par le luxembourgeois.

                Bib.: Reisdoerfer, Joseph. "Les patois romans du Grand-Duché de Luxembourg: État des recherches et perspectives." De Familjefuerscher 5, no. 15 V 1988 (1988): 41-44. BnLux; Reisdoerfer, Joseph. "Romania submersa. Kurze Darstellung des patois lorrain von Rodange." Die Warte / Perspectives, Kulturelle Wochenbeilage des Luxemburger Wortes, 22 X 1992 1992. Reisdoerfer, Joseph. "Romania submersa. Etude de la toponymie lorraine de Rodange." In Lorraine vivante: hommage à Jean Lanher, edited by Roger Marchal and Bernard Guidot, 191-99. Nancy: Presses universitaires de Nancy, 1993.

2. HISTOIRE LINGUISTIQUE: 2.2. La politique linguistique de l'occupant nazi

    Dans sa volonté d’annihiler la nation et l’État luxembourgeois, le Gauleiter Simon s’attaquera dès le début de l’occupation au multilinguisme luxembourgeois et plus précisément au luxembourgeois rabaissé à un patois de l’allemand:

    Deutsche Sprache im Sinne dieser Verordnung ist das Hochdeutsche [S]

    et à la langue française, bannie désormais de l’Administration, de la justice et de l’école primaire:

    Die Amtssprache ist ausschließlich die deutsche Sprache. Auch die Gerichtssprache ist ausschließlich deutsch. Der Unterricht in allen Schulen erfolgt ausschließlich in deutscher Sprache. In den Volksschulen entfällt die französische Sprache als Unterrichtsfach . [S]

     

    Source: Spang, Paul. Von der Zauberflöte zum Standgericht: Naziplakate in Luxemburg, 1940-1944. 2. überarb. Auflage (1. Auflage 1982) ed. Luxembourg, 1992.

     

    Le luxembourgeois et le français seront partant les langues martyres de l’occupation nazie et ce seront elles également, la liberté une fois recouvrée, qui deviendront les langues principales du pays aux dépens de la langue de l’occupant, l’allemand.

    C’est ainsi que s’explique en partie la position incontestée du français dans l’Administration, la justice et sa place prépondérante dans l’enseignement secondaire et supérieur .